Quel est l'impact ressenti des éoliennes sur le paysage ?
Ces dernières années, le nombre de projets éoliens a fortement augmenté en Wallonie. Certaines communes sont parfois sollicitées pour deux voire trois projets sur leur territoire. Cela ne veut pas pour autant dire que tous ces projets seront acceptés. Loin s’en faut. A commencer par le fait que, oui, cela a un impact sur le paysage. Mais dans quelle mesure et, surtout, qu’est-ce qui a été mis en place pour éviter les dérives ? C’est sur ce point que nous nous sommes penchés.
Quel impact réel ?
Sont-elles horribles ou majestueuses ? Les éoliennes sont dans l’air du temps. Tout le monde en parle et chacun a son avis sur le sujet. Afin de mieux comprendre l’opinion publique sur ce sujet, la Région wallonne a ordonné il y a quelques années, une étude sur l’acceptation sociale des éoliennes (Aerograf 2005). Celle-ci fut conduite auprès de 250 riverains de trois parcs wallons.
Il en ressort qu’une large majorité (72%) des personnes interrogées n’ont pas perçu de changement dans leur vie quotidienne. Deux minorités estiment que les éoliennes ont un impact sur leur vie de tous les jours :
soit « très négatif », soit « très positif ». Mais pour la plupart des riverains, elles font désormais partie du paysage – ni plus, ni moins.
Voici quelques citations pour illustrer cet état d’esprit majoritaire : « Avec le temps, ça ne dérange pas » ; « Au début, ça impressionne un peu mais on s’y habitue facilement » ; « On fait parfois une balade jusque-là » ou encore « Mes enfants aiment bien les regarder », …
Durant la phase de projet, les réactions des habitants dépendent fortement de leur connaissance réelle du projet et de leur implication dans le processus de concertation. Les personnes qui s’en tiennent aux rumeurs (« on dit que… ») expriment généralement une vive inquiétude voire un rejet par principe. Mieux, il apparait que le fait d’ouvrir la participation citoyenne au projet éolien accroit fortement l’acceptation locale des éoliennes. c’est du moins une des pistes mises en évidence par une étude de la KUL sur les capacités d’acceptation de projets éoliens.
A l’inverse, les personnes qui s’informent auprès des autorités compétentes (réunions d’information, enquête publique) comprennent le projet, évaluent les impacts possibles sur leur cadre de vie, proposent éventuellement des adaptations et sont généralement satisfaites de la réalisation du parc éolien. L’étude montre ainsi que 62 % des personnes interrogées sont prêtes à accueillir une éolienne à moins de 1.000 mètres de leur habitation.
Quelles mesures en Wallonie ?
Comme expliqué ci-dessus, une bonne information (souvent au travers de l’étude d’incidences environnementales) est importante pour balayer les doutes. Mais en amont, aussi, les communes ont, avec le temps, appris à anticiper les problèmes. Et, avant elles, la Région wallonne, qui a pris une série de mesures contraignantes, notamment en termes de respect du paysage. Ce sont ainsi plusieurs balises claires qui ont été définies :
- Un bureau d’étude (indépendant et agréé par la Région wallonne) doit analyser les incidences sur la faune, la flore et le cadre de vie des riverains dans une étude d’incidences et proposer des alternatives lorsque les incidences sont jugées trop élevées.
- Le contenu de l’étude d’incidences est ensuite contrôlé par les Pôles environnement et aménagement du territoire du Conseil économique, social et environnemental de Wallonie.
- L’avis et les remarques de la population sont officiellement sollicités à deux reprises : avant l’introduction du permis et pendant la procédure d’instruction. Les riverains les plus proches du parc sont d’ailleurs en droit de demander des analyses paysagères complémentaires afin de pré-visualiser les effets visuels des éoliennes depuis leur habitation.
- Après l’introduction du permis, l’impact sur l’environnement est ensuite analysé par le Service Public de Wallonie TLPE (Territoire, Logement, Patrimoine et Energie). L’avis que cette instance publique remet prend en considération plus de 30 critères d’appréciation, dont une distance minimale à respecter par rapport aux habitations.
- En règle générale, l’avis motivé d’autres organismes est systématiquement sollicité. Parmi ceux-ci, la Commission Royale des Monuments, Sites et Fouilles, le Département de la Nature et des Forêts pour l’intégration avec les zones naturelles protégées, le SPW Mobilité et Infrastructures pour l’intégration avec le réseau routier, les Gestionnaires des réseaux de transport et de distribution pour la sécurité et l’intégration au réseau électrique la Direction Générale du Transport Aérien du SPF Mobilité et Transports, Skeyes pour l’intégration avec l’aviation civile, la Défense, etc.
- Enfin, se basant sur un cadre de référence réglementaire ainsi que sur les avis des riverains et des organismes consultatifs, les fonctionnaires techniques et délégués des administrations externes du Service Public de Wallonie Agriculture, Ressources naturelles et Environnement statuent sur la qualité de l’intégration paysagère du projet et sur l’octroi ou le refus du permis.
Quels sont les principes qui guident ces différents organismes à apprécier le projet ?
La Wallonie posé comme fil rouge une intégration paysagère harmonieuse des éoliennes dans le paysage. Concrètement, cela se traduit par trois principes :
Regroupement : les parcs se composant d’un minimum de 5 éoliennes sont privilégiés, pour éviter l’occupation de l’espace rural par un certain nombre d’éoliennes isolées et donner alors une impression peu harmonieuse.
Limitation de la covisibilité : la présence de deux ou plusieurs parcs éoliens dans un même champ de vision est liée à l’interdistance entre parcs éoliens et dépend de différents paramètres tels que la topographie des lieux, la hauteur des éoliennes ou la végétation existante. Lorsque cette interdistance est trop limitée, elle peut entraîner une impression d’encerclement ou de saturation visuelle. Et ne sera donc généralement pas acceptée.
Cohérence paysagère : Enfin, la disposition et l’agencement des parcs éoliens doit mettre en valeur les caractéristiques du paysage et souligner ses lignes de force. Par « lignes de force » on entend « les lignes d’origine naturelle ou artificielle mettant en évidence la structure générale du paysage et servant de guide pour le regard ». En résumé, le paysage doit rester agréable au regard…du plus grand nombre. Car la beauté, cela restera toujours…du subjectif.