Les deux pays pourraient être reliés par un câble sous-marin via une île énergétique. Avec la croissance de l’éolien offshore, les îles artificielles sont appelées à se multiplier dans les mers européennes. On y produira de l'hydrogène vert à grande échelle.
Les réseaux électriques belge et danois seront-ils bientôt reliés en mer du Nord ?
L’idée peut surprendre vu l’éloignement géographique entre les deux pays. Et pourtant, ce type d’interconnexions sont amenées à se développer dans les mers européennes.
En effet, avec la multiplication de parcs éoliens offshore, les 7 pays riverains de la mer du Nord envisagent d’utiliser ces sites pour créer des interconnexions hybrides : on combine à la fois un raccordement du parc éolien maritime et une interconnexion avec un pays proche, ce qui permet de mieux intégrer et échanger les productions éoliennes.
Le premier interconnecteur hybride au monde a ainsi été inauguré en octobre 2020 en mer Baltique. Un câble électrique de 25 km relie désormais deux parcs éoliens offshore, l’un danois l’autre allemand, assurant dès lors une interconnexion entre ces deux pays.
Or cette première mondiale a été développée en partenariat avec 50 Hertz, filiale allemande d’Elia, le gestionnaire belge du réseau haute tension.
Elia dispose donc d’une expertise innovante dans ce type de projets.
Un câble sous-marin de 600 km
C’est ainsi que les gestionnaires de réseaux belge (Elia) et danois (Energynet) étudient la faisabilité d’un câble sous-marin entre la Belgique et le Danemark, sur une distance de 600 km, via un parc éolien qui formerait une véritable île énergétique (illustration ci-dessous).
Source : Elia
Prévu pour être construit à 80 kilomètres des côtes du Jutland à l’ouest du Danemark pour capter des vents puissants, ce « hub énergétique » relierait 200 puis, à terme, 600 grandes éoliennes en mer.
Avec une capacité de 3 puis 10 gigawatts, les responsables du projet avancent une production électrique permettant de fournir 3 à 10 millions de foyers, selon l’agence France Presse.
Vaste de 12 à 46 hectares, cette île artificielle jouera un rôle de centre de transit en Europe du Nord en reliant par des câbles sous-marins plusieurs autres pays voisins de la mer du Nord, comme la Norvège ou l’Allemagne.
Ce hub abritera différentes activités économiques, telles que l’exploitation et la maintenance des éoliennes et la production d’hydrogène vert par électrolyse de l’eau à partir de l’électricité éolienne.
Le projet – 28 milliards € – sera mené par le gouvernement danois, en collaboration avec des acteurs privés (dont Elia pour la connexion belge).
Le chantier débutera en 2026 et devrait s’achever entre 2030 et 2033.
Le projet s’inscrit dans le cadre des efforts du Danemark pour réduire de 70 % ses émissions de CO2 d’ici 2030 par rapport au niveau de 1990, un des objectifs les plus ambitieux en Europe.
Une île belge
Stimulé par ces innovations, le gouvernement belge annonce également la création d’une île énergétique proche de la côte belge, dans le cadre du plan de relance économique post-Covid-19.
Elle devrait être installée dans les eaux territoriales belges, au sein de la deuxième zone dédiée à l’éolien offshore – baptisée Princesse Elisabeth, côté France -, où 2,2 GW seront construits (voir carte ci-dessous et lire notre article La Belgique doublera sa puissance éolienne en mer du Nord).
Selon L’Echo (11/02/2021), ce hub énergétique multifonctionnel servira de plaque tournante pour la connexion des futurs parcs éoliens belges, mais accueillera aussi des liaisons sous-marines permettant d’échanger l’électricité éolienne avec d’autres pays – notamment le Danemark.
Cette île artificielle s’étendrait sur 5 hectares et accueillerait diverses activités : la production d’hydrogène vert, le stockage par batteries, l’installation d’un data center, le développement de panneaux photovoltaïques flottant entre les éoliennes ou encore l’implantation d’antennes 5G.
Le projet – 420 millions € – pourrait être opérationnel mi-2025.
La Belgique, numéro quatre mondial de l’éolien en mer, développerait ainsi une expertise qui sera très sollicitée à l’avenir.
Multiplier les îles énergétiques
En effet, les îles énergétiques sont appelées à se multiplier dans les mers européennes.
En Belgique, les projets éoliens offshore sont programmés pour atteindre 4,5 GW. Selon le Plan de développement fédéral, le potentiel éolien maximum dans les eaux territoriales belges est estimé à 8 GW, ce qui s’avère insuffisant pour atteindre les objectifs européens.
D’où l’idée d’intégrer la Belgique dans un réseau maillé international en mer du Nord.
L’initiative «North Seas Energy Cooperation » mène ainsi des études de projets hybrides concrets dans le secteur maritime compris entre la Belgique, les Pays-Bas et le Royaume-Uni.
Ces hubs permettront, ici aussi, de mieux intégrer et échanger l’électricité éolienne entre les pays; mais aussi de produire de l’hydrogène vert à grande échelle (voir carte ci-dessous).