L’Université de Louvain (KUL) a mis au point un panneau solaire qui convertit 15% de la lumière du soleil en hydrogène gazeux. Un record mondial ! Voici pourquoi cette avancée technologique offre de nouvelles perspectives.
Ce n’est pas la première fois que Renouvelle aborde la question du stockage de l’énergie renouvelable de flux (vent et soleil) sous forme d’hydrogène.
Ce type de stockage a comme intérêt majeur son caractère inter-saisonnier d’une part, et sa densité énergétique d’autre part. Autrement dit, on peut le produire l’été et l’utiliser l’hiver tout en le stockant dans des volumes plus raisonnables qu’une batterie chimique d’aujourd’hui.
Une avancée technologique
Une équipe de l’Université de Louvain (KUL) a annoncé dans un communiqué, fin février 2019, la mise au point d’un panneau solaire capable de convertir directement 15% de la lumière du soleil en hydrogène gazeux. Un record mondial !
En quoi est-ce une nouveauté ?
La nouveauté réside dans le fait que la production de l’hydrogène ne passe pas, dans ce cas-ci, par une première étape de production d’électricité.
Ce n’est donc pas de la production d’électricité solaire (PV) couplée à de l’électrolyse, c’est de la PhotoElectroChimie (PEC).
Ce procédé évite ainsi 2 étapes de transformations, ce qui limite les pertes. Il offre dès lors un meilleur rendement de conversion de la lumière (énergie de flux) en hydrogène (énergie de stock), comme l’illustre la figure suivante, issue de cette publication scientifique.
Les étapes de transformation du courant électrique en courant alternatif (90%) et d’électrolyse de l’eau (75%) n’existent plus dans le schéma PEC, soit un rendement avant stockage qui passe de 13,5 à 15%. Un record mondial.
L’autre innovation réside dans le fait que l’hydrogène n’est pas produit à partir d’eau liquide, mais à partir de la captation de l’humidité de l’air. C’est une grande évolution car l’électrolyse de l’eau nécessite, elle, des quantités d’eau liquide fortement purifiée.
Mieux que le solaire photovoltaïque ?
L’hydrogène solaire est-il plus performant que le photovoltaïque ? Pas vraiment en matière de rendement aujourd’hui. On commercialise actuellement des capteurs photovoltaïques qui atteignent 22 % de rendement et même plus (Bifacial) et des onduleurs dont les rendements dépassent les 95%. Le solaire photovoltaïque est donc encore un candidat plus que valable.
Là où cette nouvelle filière est prometteuse, c’est sa marge de progression (elle est encore très jeune et sort à peine du laboratoire) et ses moindres coûts de production d’hydrogène – l’étape d’électrolyse n’étant plus nécessaire.
Comme pour le photovoltaïque, plus il y a de lumière, plus on produit.
Limites
Les capteurs présentés par la KUL doivent cependant encore passer l’étape de sortie du laboratoire et la solution de conditionnement pour stockage.
De plus, ces capteurs sont dédiés 100% à la production d’hydrogène. Cela signifie qu’il n’est pas possible de produire directement de l’électricité avec ces capteurs.
L’histoire récente de l’énergie solaire a montré que ce manque de flexibilité est un gros handicap pour une technologie : le solaire thermique s’est ainsi fait rapidement détrôné par le photovoltaïque, beaucoup plus flexible (lire nos articles Nous avons testé le PVheater, un stockage de l’électricité photovoltaïque excédentaire domestique et Eau chaude sanitaire : quelle technologie solaire choisir ?).
Avantages
Le gros avantage, nous l’avons déjà dit, est la suppression de l’étape d’hydrolyse. Cela permet de réduire les coûts financiers mais également les coûts énergétiques (voir figure) qui seraient diminués de 20 à 60% en fonction des systèmes qui seront commercialisables.
La suppression de l’étape d’hydrolyse de l’eau, combinée à la potentialité d’utiliser l’eau présente dans l’air, rend la production d’hydrogène solaire fortement décentralisable et ouvre de nouvelles perspectives et des alternatives aux batteries chimiques dans les secteurs suivants :
- Production directe sur véhicules routiers (camions, bus) ;
- Production directe sur bateaux (fluviaux ou marins) ;
- Production dans les endroits isolés (îles, refuges, bases extra-terrestres) ;
- Production industrielle à proximité des aéroports.
Comme pour toutes les filières productrices d’hydrogène, la question du volume de stockage reste le nœud gordien. Le record de la KUL n’y répond pas directement, mais le niveau de décentralisation que son avancée suggère permet de légèrement contourner le problème ou de le penser autrement.
Et, une fois encore, plus nos besoins seront réduits, plus simple sera la réponse à cette question.
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