C’est le sujet du moment, les prix de l’énergie s’affolent et beaucoup d’experts s’accordent à dire que cela risque de durer.
Dans l’urgence, les gouvernements tentent, à coups de milliards, d’aider les consommateurs à payer leurs factures, devenues impayables. Face aux conséquences immédiates de cette crise, ces mesures sont nécessaires, mais pas suffisantes, car elles ne résolvent en rien la racine du problème. Sans parler de leur énorme impact sur des finances publiques, déjà fragilisées par deux années de crise sanitaire.
Des mesures structurelles, plus lentes à mettre en œuvre, mais moins coûteuses, plus efficaces et impactant tous les consommateurs, doivent également être prises. A commencer par une réforme du marché de l’énergie, des politiques plus volontaristes d’efficacité et de sobriété ainsi qu’un coup de boost à la production d’énergie renouvelable doublé d’une flexibilité accrue de la demande. Mais il en existe une dernière, dont on parle peu : les nouveaux acteurs du marché de l’énergie (les producteurs, les fournisseurs, les installeurs de bornes de recharge des véhicules électriques, …) et les objectifs qu’ils poursuivent.
Quelles sont les caractéristiques de ces acteurs alternatifs ?
– Ils ne recherchent pas le profit financier et mettent en priorité la génération de bénéfices sociaux, environnementaux ou économiques.
– Ils sont gérés par les consommateurs eux-mêmes qui dépassent ainsi leur rôle de simple « payeur de facture » et s’autoorganisent pour satisfaire une partie de leurs besoins énergétiques.
– Ils ont une dimension locale et prennent en compte les spécificités des territoires.
Quel est leur impact sur la facture des consommateurs ?
Aujourd’hui, les prix de vente de l’énergie sont, pour certaines sources de production (nucléaires ou renouvelables par exemple), bien supérieurs aux coûts de production. Générant ainsi d’énormes profits pour les producteurs d’énergie, au détriment du portefeuille des consommateurs. Un acteur, sans but lucratif, qui produit et vend de l’énergie, va renoncer à ces profits, jugés superflus, permettant à ses clients d’accéder à une énergie moins chère que le prix du marché.
Des acteurs, gérés par les consommateurs eux-mêmes, cela veut dire qu’ils répondent à une partie de leurs besoins énergétiques, sans intermédiaire qui poursuit ses propres intérêts. La production, la vente, ou encore la consommation d’énergie poursuivent dès lors un intérêt unique : celui du consommateur, dont l’accès, en continu, à une énergie moins chère est certainement l’une des composantes principales.
Cette production locale permet de partager en direct de l’énergie renouvelable avec d’autres consommateurs qui, seuls, n’en auraient pas les moyens, tout en consommant soi-même directement de l’énergie renouvelable, moins chère pour tout le monde.
Ce scénario est plus qu’une belle histoire, c’est déjà, ici et là, une réalité.
Le fournisseur sans but lucratif wallon Cociter, est aujourd’hui l’un des fournisseurs le moins cher en Wallonie.
A Bruxelles, plusieurs dizaines de consommateurs se partagent au niveau local de l’électricité renouvelable, sans passer par un fournisseur traditionnel, bénéficiant ainsi, pour une partie de leur consommation, d’une électricité dont le prix est largement inférieur à celui du marché.
Les communautés d’énergie, principales représentantes de ce type d’acteurs, sont aujourd’hui reconnues légalement et émergent petit-à-petit. Freinées par une lenteur administrative toute régionale (en Flandres et à Bruxelles c’est plus que sur les rails tandis qu’en Wallonie, à part quelques projets pilotes, on parle de 2024…peut-être, alors que cela était décrit comme l’une des priorités du Gouvernement dans sa note de …2019).
Une relation nouvelle à l’énergie
Développer ces acteurs alternatifs demande aux consommateurs une participation active pour répondre à leurs besoins énergétiques. Les faisant endosser un réel rôle de consomm’acteurs. C’est l’évolution vers une relation nouvelle et plus complexe avec l’énergie qui est en vue. Mais nécessaire. Bien au-delà de l’aspect économique individuel, c’est le bien-être écologique global qui en dépend.
Il est donc évident que pour se développer, ces modèles ont besoin de soutien légal, technique, voire financier des pouvoirs publics et que chacun ne pourra y contribuer de manière égale et devra avoir la possibilité de le faire, en fonction de ses moyens et spécificités.
Cependant, ces acteurs offrent aux consommateurs une solution concrète pour sortir (du moins en partie) de l’impasse économique dans laquelle nous a mené le système énergétique actuel, basé sur des énergies fossiles de plus en plus rares et chères et des acteurs centralisés, répondant à une logique lucrative, contraire à l’intérêt des consommateurs. La question est donc de savoir à qui profite…la crise.