Sons, infrasons et ombres portées des éoliennes. Beaucoup de bruit pour faire de l'ombre ?
Parmi les arguments qui sont souvent mis en avant par les opposants à l’éolien, il y a les effets sur la santé des riverains ou, à tout le moins, les nuisances sonores ou visuelles. On parle de niveau sonore, d’infrasons et d’ombres portées notamment. Quelle est la part de vrai dans ces allégations et, surtout, quelles sont les données qui permettent d’étayer ou d‘infirmer pareils arguments ?
20 ans d’études
L’incidence des éoliennes sur la santé est un sujet qui est analysé depuis vingt ans dans plus de 30 pays occidentaux. Et à ce jour, aucun effet sur la santé humaine n’a été révélé : ni le bruit, ni les basses-fréquences, ni les infrasons. Pour suivre, et pour parler du bruit, il suffit de se balader le long d’un parc éolien et de tendre l’oreille pour se faire une opinion. Selon les saisons et les conditions météorologiques, le son généré par les éoliennes est peu perceptible ou couvert par le bruit du vent ou… d’une route. Ceci étant dit, il n’est pas rare d’entendre des riverains, se plaindre de troubles dus aux nuisances sonores. Toute la question est de connaitre la part de subjectivité dans ce cas car il est évident que si l’on va implanter une éolienne dans une campagne très calme, cela peut entraîner une nouvelle source de bruit dans l’environnement.
Pour garantir un cadre de vie de qualité aux riverains, la réglementation wallonne impose des normes de bruit à l’immission (au voisinage des habitations et non au niveau de l’éolienne) de :
- 45 dBA maximum le jour (7-19 h) et
- 43 dBA maximum en dehors de ces heures et les dimanches et jours fériés.
Concrètement, ces niveaux sonores sont équivalents au bruit à l‘intérieur d’une maison calme ou d’une bibliothèque.
Mais au-delà de ces normes… Alors que le bruit est en grande partie objectivable par une série de mesures (intensité, fréquence, constance), son ressenti et sa perception par les riverains reste une question fortement subjective : certains y verront des désagréments alors que d’autres pas.
Alors est-ce vraiment nocif ?
La science le confirme
Pour répondre de manière scientifique, il y a eu de nombreuses études récentes menées sur l’impact potentiel des éoliennes sur la santé humaine au fil des ans. Une des études les plus récentes sur ce sujet a été publiée en 2020 dans la revue scientifique « Environmental Research ». Cette étude a examiné les données de santé de plus de 6.000 personnes vivant à proximité d’éoliennes terrestres en Ontario, au Canada. Les chercheurs n’ont pas trouvé de lien entre l’exposition aux éoliennes et les problèmes de santé mentale ou physique, tels que les maux de tête, les troubles du sommeil ou l’anxiété. Une autre étude importante a été publiée en 2019 dans la revue « Frontiers in Public Health ». Cette étude a examiné 18 autres études publiées sur l’impact des éoliennes sur la santé humaine et a conclu qu’il n’y avait aucune preuve solide que les éoliennes avaient un impact significatif sur la santé des populations environnantes.
Même les infrasons ?
Les infrasons sont de même nature physique que le son, c’est une vibration de l’air mais qui n’est pas perçue par l’oreille. Ils sont généralement issus de phénomènes naturels que l’on retrouve partout où le vent souffle et rencontre des obstacles (comme les bâtiments, les arbres,…). Ils peuvent également être générés par les activités humaines. La circulation automobile ou l’utilisation de certains outils dans nos jardins ou maisons peuvent ainsi également produire des infrasons. Comme par exemple une pompe à chaleur, la ventilation, le lave-linge, le sèche-linge ou el frigo. Mais ces infrasons sont-ils dangereux pour l’homme pour autant ? Là est la question.
L’Agence française de sécurité sanitaire a publié un rapport sur cette question. Corroboré par plusieurs autres depuis, notamment une étude finlandaise[1] qui a combiné campagne de mesure des infrasons et analyse de la santé de riverains de parcs éoliens. On y lit que les émissions sonores des éoliennes ne génèrent pas de conséquences sanitaires directes sur l’appareil auditif. Aucune donnée sanitaire disponible ne permet d’observer des effets liés à l’exposition tant aux sons qu’aux infrasons générés par ces machines. Cette information scientifique est d’ailleurs confirmée par la réalité du terrain : il y a plus de 50.000 éoliennes dans le monde, dont certaines fonctionnent depuis plus de 20 ans. Depuis tout ce temps, aucun problème de santé qui aurait alerté les autorités sanitaires n’a été mis en évidence.
Quid du fameux effet d’ombre portée ?
Lorsque le soleil est visible (ou que la lune est forte), une éolienne projette une ombre sur le terrain qui l’entoure. La rotation des pales qui traversent la lumière du soleil provoquent alors un effet d’ombre portée (parfois appelée à tort effet stroboscopique). Toujours d’après les scientifiques, cet effet est sans incidence sur la santé. Il peut cependant être dérangeant pour les habitations situées à l’intérieur de la zone d’ombre. Afin d’éviter toute gêne, la règlementation wallonne impose l’analyse détaillée de cet effet d’ombre portée dans l’étude d’incidences. Des mécanismes de simulation en 3 D sont désormais possibles grâce à la digitalisation des plans, ce qui permet d’analyser avec certitudes la présence et fréquence du phénomène d’ombre portée. Et si l’étude montre que le projet éolien en question va avoir des effets d’ombre portée sur une ou plusieurs maisons, des adaptations du projet seront nécessaires. Le permis ne sera octroyé que si le projet éolien respecte les normes d’exposition légales, à savoir 30 heures maximum par an et 30 minutes maximum par jour. En cas de risque avéré, la localisation de l’éolienne pourra être modifiée ou elle pourra être munie d’un système d’arrêt automatique stoppant le rotor lorsque l’effet d’ombre portée se manifeste dans une habitation.
En conclusion
On le voit, que ce soit au travers des constats sur place ou des études scientifiques, tout confirme une chose : les nuisances sonores demeurent surtout une perception déformée de la réalité. Perception subjective, altérée sans doute par d’autres aspects (points de vue subjectifs, influences extérieures…). Mais en aucuns cas, on ne peut d’une part évoquer de réelles nuisances sonores constatées et, surtout, d’impact sur la santé humaine. Il s’agirait donc, au travers de ces arguments, d’une manière, comme une autre, ici aussi, de faire beaucoup de bruit pour essayer de nuire aux éoliennes. Pour le reste, celles-ci demeurent une solution pour faire du bien à la planète plutôt que du mal aux gens, là est la certitude.
[1] https://www.vttresearch.com/en/news-and-ideas/vtt-studied-health-effects-infrasound-wind-turbine-noise-multidisciplinary