Les communautés d’énergie, une forme d’économie sociale

Les Etats européens et les Régions belges doivent actuellement intégrer les concepts européens des communautés d’énergie. Or, en Belgique, ces concepts sont déjà bien balisés par le modèle de l’économie sociale. Exemple avec Rescoop Wallonie. 

L’Europe a instauré un nouveau droit pour les citoyens, les PME et les municipalités : celui de produire, vendre (partager), stocker et consommer une énergie renouvelable locale dans l’objectif de produire des bénéfices sociaux, économiques et environnementaux aux participants ou à la collectivité. A titre d’exemple, il sera bientôt possible, partout en Belgique et en Europe, d’équiper un bâtiment – école, entreprise, … – en panneaux photovoltaïques et de vendre cette production d’électricité à un tarif intéressant, dans le sens où le tarif reconnait les bénéfices apportés, aux voisins – ménages, logements sociaux, commerces, … 

Sur base de deux directives européennes, ce droit peut s’exercer, entre autres mais pas uniquement, sous forme de communauté (nouvelle entité juridique). Cette communauté d’énergie est soit “citoyenne”, soit “renouvelables”. 

Ces textes législatifs visent à renforcer le rôle des citoyens, des pouvoirs locaux et des PME comme acteurs du marché de l’énergie, en plaçant en dernier lieux l’objectif de profits financiers et en mettant en avant la génération de plus-value sociales, environnementales ou économiques au bénéfice des membres ou du territoire sur lequel les activités sont exercées. 

C’est, en soi, une véritable révolution culturelle dans un monde énergétique totalement dominé par des entreprises (ou des groupes) dont l’objectif premier (la recherche du profit financier) induit jusqu’à présent le mode de fonctionnement, oriente les innovations et façonne le lobbying.  

Les Etats membres travaillent désormais à la transposition de ces directives européennes, à finaliser d’ici le 30 juin 2021. Pour mieux connaître ce processus et ses enjeux, lire notre article Vers des citoyens acteurs du marché de l’énergie durable

 

Un cadre déjà défini par l’économie sociale 

 

Si le concept des communautés d’énergie, et les objectifs spécifiques qui leurs sont attachés par définition, est inédit dans le secteur de l’énergie, nous avons la chance de pouvoir nous appuyer sur une base légale qui embrasse la plupart de leurs caractéristiques. 

Cette base existe en Europe, en Belgique, dans les Régions et la Fédération Wallonie-Bruxelles : c’est celle de : l’économie sociale. 

En effet, l’économie sociale est un modèle économique déjà largement défini et qui rejoint complètement les définitions européennes, et l’esprit des communautés d’énergie. 

Selon l’association SAW-B – Solidarité des Alternatives Wallonnes et Bruxelloises -, acteur de référence de l’économie sociale, la définition suivante fait aujourd’hui l’unanimité en Wallonie : 

« L’économie sociale est un modèle économique qui se définit par ses valeurs. L’économie sociale se compose d’activités économiques, productrices de biens ou de services, exercées par des sociétés, principalement coopératives et/ou à finalité sociale, des associations, des mutuelles ou des fondations, dont l’éthique se traduit par l’ensemble des principes suivants : 

  • finalité de service à la collectivité ou aux membres, plutôt que finalité de profit ; 
  • autonomie de gestion ; 
  • processus de décision démocratique ; 
  • primauté des personnes et du travail sur le capital dans la répartition des revenus. » 

 

(Pour en savoir plus : saw-b.be – La Région bruxelloise a adopté une définition similaire).

Or les 3 premiers principes des communautés se retrouvent presque mot pour mot dans les directives européennes relatives aux communautés d’énergie. Avec un ajout : l’objectif de générer une plus-value environnementale. 

 

Les coopératives citoyennes : de futures communautés d’énergie déjà existantes 

 

Par conséquent, les entreprises d’économie sociale actives dans le domaine de l’énergie en Belgique, sont déjà des formes de communauté d’énergie. Et la structure légale qui leur correspond le mieux : c’est la coopérative, même si cela n’exclut pas les asbl ou tout autre forme d’entreprise qui inscrirait dans ses statuts les 3 principes de l’économie sociale, évoqués par les directives, et / ou l’objectif de création de plus-value environnementale. 

Concrètement, les nombreuses coopératives citoyennes actives dans la production d’énergie renouvelable – éolien, photovoltaïque, hydroélectricité, biomasse, … – représentent, par leurs valeurs, statuts, fonctionnement et finalités, à la fois des acteurs de l’économie sociale et des (futures) communautés d’énergie. 

Les politiques et les administrations chargées de la transposition du droit européen trouvent donc ici un terrain connu et un cadre déjà largement implémenté en Belgique qui devrait faciliter la tâche de transposition et de cohérence inter-régionale et fédérale. 

 

La Wallonie anticipe et soutient Rescoop Wallonie 

 

La Wallonie a récemment pris la mesure de ces obligations européennes et anticipé la transposition des directives en accordant un soutien à Rescoop Wallonie, la fédération des coopératives citoyennes actives dans la production d’énergie verte, locale et renouvelable. 

Le Gouvernement wallon a en effet accordé un subside pluri-annuel à Rescoop Wallonie pour “augmenter et développer ce modèle alternatif de gestion et de production d’énergie”. 

REScoop Wallonie, qui rassemble aujourd’hui 16 coopératives citoyennes, 12 000 coopérateurs et alimente déjà plus de 16.000 ménages en énergies renouvelables, pourra ainsi mettre à disposition de ses membres “des services et outils pour augmenter et mutualiser leurs productions d’énergie et générer des économies financières”.  Les bénéfices engrangés par ces opérations seront ensuite réinvestis dans la production d’énergie renouvelable. 

Signe d’une transition à la fois économique, écologique et sociale, ce soutien est accordé par la Ministre wallonne en charge de l’Économie sociale, Christie Morreale, et par le Ministre wallon de l’Energie, Philippe Henri (lire le communiqué commun). 

Rescoop Wallonie pourra ainsi jouer un rôle moteur dans l’émergence des communautés d’énergie en Wallonie, en s’appuyant sur le cadre existant de l’économie sociale.