COOPEOS, la coopérative qui développe le bois-énergie

COOPEOS propose aux écoles, communes ou entreprises une solution innovante pour chauffer les bâtiments à partir de déchets verts. Avec un financement citoyen et une sensibilisation à l'énergie durable.

Créée en 2015 et basée à Ottignies, COOPEOS est reconnue comme étant la coopérative wallonne spécialisée dans le bois-énergie. Son expertise s’est développée autour d’un concept innovant : elle développe une filière locale de récolte de déchets verts (branchages issus de la gestion des espaces verts), sèche et transforme la matière en plaquettes et installe des chaudières bois auprès de consommateurs de chaleur locaux.

COOPEOS s’adresse ainsi aux écoles, communes, piscines, hôpitaux, maisons de repos ou entreprises qui souhaitent remplacer leur chaudière (gaz ou mazout) et leur propose un service complet (installation, maintenance et combustible vert).

Grâce à l’épargne citoyenne, la coopérative peut même financer le projet.

Autre dimension intéressante : COOPEOS s’appuie sur ses projets pour mener des actions de sensibilisation à l’énergie durable avec des partenaires locaux.

Un projet-pilote a été inauguré en juin 2017 au Moulin de la Hunelle à Chièvres, désormais alimenté par une chaudière bois de 200 kW. Caroline Lambin, co-fondatrice de COOPEOS et Responsable commerciale, nous donne ses premiers retours d’expérience.

L’équipe de COOPEOS

Christophe Haveaux (Renouvelle) : Comment s’est concrétisé votre premier projet ? Est-il représentatif de votre concept de « Biomasse locale pour une chaleur durable » ?

Caroline Lambin (COOPEOS) : C’est un cas idéal car la filière complète se trouve réunie en un seul lieu. Il s’agit d’une entreprise de travail adapté qui mène notamment une activité d’entretien de parcs et jardins qui génère chaque année 1500 m3 de déchets verts. Nous avions donc une ressource locale disponible. L’entreprise est également consommatrice de chaleur, par ses autres activités – menuiserie, blanchisserie, HORECA, … Nous transformons donc leurs déchets verts pour chauffer leurs bâtiments (voir photo en haut de l’article).

Nous produisons là-bas 300 tonnes de combustible, soit l’équivalent de 150.000 litres de mazout par an. Et comme l’entreprise ne consomme qu’un 1/3 des plaquettes produites localement, nous allons identifier d’autres consommateurs de chaleur dans un rayon de 15 km environ. C’est notre logique de plateforme locale de transformation de déchets verts, avec l’installation de plusieurs chaudières alentours. La production de plaquettes et l’installation de chaudières bois doivent se faire en parallèle, localement. C’est pourquoi il est important de gérer la filière complète.

Frédéric Bourgeois (COOPEOS) présente la chaudière bois de 200 kW installée au Moulin de la Hunelle. L’entreprise se chauffe désormais au bois et pourra tirer un bénéfice de la vente de plaquettes.

C.H. : Quels sont les avantages pour le consommateur de chaleur ?

C.L. : Le consommateur confie l’investissement à la coopérative et ne doit donc pas investir. Grâce à sa nouvelle chaudière bois, il gagne immédiatement en rendement énergétique. Il nous paie alors un montant fixe durant 10 ans, basé sur son ancienne facture d’énergie fossile. Après ce terme, il verra sa facture énergétique diminuer de 50% à 60%. Il ne restera en effet que l’achat du combustible à payer. Or le bois-énergie coûte environ moitié moins cher que le gaz ou le mazout.

C.H.: Comment réagissent jusqu’ici les différents types de consommateurs que vous contactez ?

C.L.: Il y a beaucoup d’intérêt mais la mise en oeuvre prend du temps car notre accompagnement global est innovant aux niveaux technique et financier. Les entreprises privées sont très sensibles aux arguments économiques et à la réduction de leurs émissions de CO2. C’est également un projet intéressant pour leur image.

D’autre part, de nombreuses communes nous contactent car elles sont engagées dans la Convention des maires et poursuivent des objectifs importants en énergies renouvelables, bilans CO2 et mobilisation citoyenne (lire notre article Plus de 200 communes wallonnes en transition énergétique).

La Wallonie génère chaque année 240.000 tonnes de déchets verts, collectés dans les parcs à conteneurs. Si on les valorise en plaquettes (photo), on peut substituer 60 millions de litres de mazout par an.

C.H.: Comment identifiez-vous le potentiel local et la prévisibilité de la ressource biomasse?

C.L.: Le potentiel est très important, partout en Wallonie. Les déchets verts représentent un coût pour ceux qui doivent les éliminer et COOPEOS apporte une solution pour éviter ces coûts et, plus encore, pour en faire une source de revenus. Les entrepreneurs de jardin, par exemple, qui doivent amener leurs déchets verts dans les sites de gestion de déchets, paient de 35€ à 70€ par tonne.

Au Moulin de la Hunelle, nous avons proposé aux entrepreneurs de jardin de la région de venir déposer gratuitement leurs déchets verts. Nous avons rencontré un tel succès que nous avons dû limiter les dépôts!

De même, les intercommunales sont intéressées par notre solution. Elles collectent chaque année 240.000 tonnes de déchets verts à partir des parcs à conteneurs. Elles transforment ces déchets en compost, ce qui représente un coût pour la collectivité de 40€ par tonne. De plus, le bois se transforme mal en compost. Certaines intercommunales le valorisent énergétiquement mais, tel quel, ce combustible est trop humide et il est envoyé dans de très grosses chaufferies industrielles au Luxembourg ou en Allemagne.

Si on transforme ces déchets en plaquettes, on peut substituer localement 60 millions de litres de mazout par an.

C.H. : Il s’agit là de projets de plus grande envergure pour COOPEOS. Comment envisagez-vous d’y répondre ?

C.L. : Oui. Cela nécessite de créer de plus grandes plateformes et de trouver de plus gros consommateurs de chaleur alentours. Le processus de transformation est aussi différent. Pour les petites plateformes comme le Moulin de la Hunelle, le séchage peut se faire naturellement.

Pour une grande plateforme, il faut un séchage mécanique avec un roulement de la matière. On identifie alors des sources de chaleur non exploitées qui pourraient servir au séchage, dans des centrales de biométhanisation par exemple.

C.H. : Vous estimez donc pouvoir garantir l’approvisionnement du client en combustible ?

C.L. : Oui. La convention avec le client donne une garantie sur la ressource à long terme.

L’activité de récolte, broyage, séchage, … crée également de l’emploi.

C.H. : Votre modèle coopératif ne se limite pas à fournir une chaleur locale et durable mais aussi à sensibiliser vos partenaires. Comment vous y prenez vous ?

C.L. : Nous voulons que chaque projet concret soit un point de départ pour sensibiliser les acteurs locaux. Quand une commune ou une école décide de changer de chaudière, c’est une opportunité pour les citoyens de financer un projet local via notre coopérative. Nous conseillons ensuite d’améliorer l’isolation, de placer des panneaux photovoltaïques, … mais nous proposons que ces actions soient réalisées par des coopératives citoyennes locales, afin de susciter une mobilisation locale. Nos contrats à long terme permettent de travailler sur la sensibilisation, de développer des partenariats avec des associations qui mèneront des actions de terrain.